[Bordeaux Tasting] Saint-Émilion en six Grands Crus Classés 2019

Salle comble ce matin pour une prestigieuse master class à la découverte des terroirs de l’appellation de la rive droite bordelaise, à travers le millésime 2019 de six de ses ambassadeurs. Le récit comme si vous y étiez.

C’est le genre d’occasion qui vaut la peine d’oublier la grasse matinée dominicale et de braver les températures en dessous de zéro ! Ce matin, se tenait à Bordeaux Tasting une master class d’excellence sous la houlette du grand reporter de Terre de Vins Mathieu Doumenge, accompagné de François Despagne, à la tête du château Grand Corbin Despagne et président de l’Association des grands crus classés de Saint-Émilion. Sous les projecteurs de la très belle salle à l’étage du Palais de la Bourse, le millésime 2019 des châteaux Bellefont-Belcier, Corbin, Laroque, Sansonnet, Château Ripeau et Petit Faurie de Soutard.

À la découverte du terroir de Saint-Émilion

En préambule, une petite révision sur le terroir de la rive droite s’impose. Avec pour voisins directs Pomerol et Fronsac, Saint-Émilion compte 5 400 hectares sur les 112 000 du vignoble de Bordeaux. Sur ces terroirs argilo-calcaires, le merlot est roi, tirant profit des sols frais pour s’adapter aux conditions extrêmes parfois imposées par le réchauffement climatique. Quelque 700 producteurs exploitent ce vignoble, avec nombre de propriétés toujours familiales, et une cave coopérative vinifiant 20 % de la récolte.

Appellations et classement

Sur la même aire géographique, cohabitent les deux appellations Saint-Émilion et Saint-Émilion Grand Cru, avec des conditions de production plus strictes pour l’obtention de la deuxième. Pour décrocher ensuite l’appellation Saint-Émilion Grand Cru Classé, dix ans de production préalable en Saint-Émilion Grand Cru sont nécessaires.

Depuis 1955, Saint-Émilion dispose de son classement, théoriquement révisé tous les dix ans et « source de dynamisme pour les consommateurs et d’émulation pour les propriétés », selon François Despagne. Après les classements de 1955, 1969, 1986, 2006, 2012, la dernière mouture a été révélée en ce mois de septembre 2022, consacrant 71 grands crus classés, parmi lesquels 14 premiers grands crus classés, dont deux « A » (châteaux Figeac et Pavie). Le classement se base sur une notation établie pour moitié grâce à une note octroyée après dégustation à l’aveugle des dix derniers millésimes, et pour l’autre sur des critères liés à la culture de la vigne, au terroir et à la notoriété. Ce n’est qu’en décrochant la note de 14/20 qu’un grand cru classé peut ensuite demander à être auréolé du titre de premier grand cru classé (octroyé après dégustation à l’aveugle de 15 millésimes plus anciens et avec un poids plus important du critère de notoriété).

Parmi cette famille des grands crus classés, depuis 1982, certains ont fait le choix de se réunir au sein de l’Association des grands crus classés de Saint-Émilion, pour mener des actions de promotion en France et à l’international. Aujourd’hui, ce groupe compte une cinquantaine de crus – soit plus de 80 % de ceux de Saint-Émilion -, dont les six en dégustation ce dimanche. Douze à treize nouvelles adhésions sont attendues dans un futur proche.

Le millésime 2019

Ce 2019 fait partie d’une belle trilogie, aux côtés de 2018 et 2020, « trois millésimes merveilleux, commente François Despagne, je les aime tous comme mes enfants ! » Solaire et chaud, 2019 se dévoile « riche et fin, déjà étonnamment accessible. Il est en ce moment plus aimable que 2018 qui est plus tannique, et que 2020, riche en tout. » Cette amabilité dès la prime jeunesse, à l’image d’un mouvement de fond qui porte les vins bordelais, est « l’une des grandes évolutions saint-émilionnaises, tout comme l’obligation de certification environnementale qui pourrait bien bientôt être incluse dans le cahier des charges de l’appellation », prédit François Despagne. Sorti en primeur en 2020 en pleine crise du Coronavirus, dans un contexte mondial figé, ce 2019 est, aux dires de Mathieu Doumenge, « l’affaire du siècle, avec des tarifs accessibles dans le sillage de diminutions de prix d’environ 30 % initiées par les propriétés médocaines. »

2019 en six vins

Château Bellefont-Belcier 2019

Depuis 2017, ce domaine est possédé par l’homme d’affaires chinois, implanté à Bordeaux depuis vingt ans, Peter Kwok, également à la tête de six autres domaines sur la rive droite, réunis sous l’entité Vignobles K. Ce passionné de vin a mené une restauration remarquable de ce domaine de 13 hectares aux beaux terroirs à dominante calcaire, en en conservant notamment le très beau chai rond ancien. Assemblage à 70 % merlot, 25 % cabernet franc et 5 % cabernet sauvignon, ce 2019 se dévoile « sur un classicisme moderne, avec un bel éclat aromatique, une structure tannique fine et élégante, et une certaine fraîcheur en bouche », constate Mathieu Doumenge. « Déjà très aimable, il est élégant, offre beaucoup de plaisir, et fonctionnera très bien, même avec du poisson ou une viande blanche », assure François Despagne.

Château Corbin 2019

Jadis, nombre de crus étaient de grandes seigneuries affichant jusqu’à 300 ou 400 hectares de superficie. Morcelées après la Révolution française, elles ont donné naissance à plusieurs domaines, à l’image par exemple des châteaux Grand Corbin-Despagne et Corbin. D’une surface de 13 hectares, ce dernier est actuellement possédé par Anabelle Cruse et Sébastien Bardinet. Mitoyen de Pomerol, le domaine bénéficie de terroirs de sables sur argiles bleues à l’origine d’un « assemblage à 90 % de merlot complété de cabernet franc, très différent de château Bellefont-Belcier », commente le duo d’animateurs. Cette comparaison met avec force en évidence les subtilités des terroirs à l’honneur dans cette master class, plus argileux pour Corbin, plus calcaires pour Bellefont-Belcier. « Déjà délicat et agréable, ce 2019 sera délicieux avec un veau aux morilles, une volaille ou un chapon », selon François Despagne. Une alliance parfaitement d’actualité pour les fêtes de fin d’année !

Château Laroque 2019

Deuxième plus grand cru classé de Saint-Émilion en surface derrière le château Fombrauge, le château Laroque occupe 60 hectares sur la partie calcaire à l’est de Saint-Émilion. Ce terroir assure à la fois une belle maturité et une jolie fraîcheur, avec des pH bas dans les vins. Assemblage à 97 % de merlot et 3 % de cabernet franc, ce 2019 s’exprime avec « une droiture distinctive doublée d’une belle maturité, et d’une minéralité qui laisse en bouche une finale crayeuse. »

Château Sansonnet 2019

Depuis 2009, c’est une famille locale qui préside aux destinées de ce domaine, en la personne de la gérante Marie-Bénédicte Lefévère, docteur en pharmacie et fille de propriétaires à Pomerol et Saint-Émilion. Elle mène sur ces terres « une œuvre de précision, pour proposer une autre interprétation d’un terroir calcaire. Assemblage à majorité de merlot (90 %), agrémenté de cabernet sauvignon (7 %) et cabernet franc (3 %), ce Sansonnet 2019, peaufiné par un élevage avec 70 % barriques neuves, se dévoile « riche et plein », avec une puissance bien équilibrée par sa minéralité et sa verticalité. »

Château Ripeau 2019

Proche de Pomerol, ce secteur de Saint-Émilion voisin de Corbin se caractérise par partie ses argiles bleues ou crasse de fer. « Les vignerons font en sorte que les racines traversent le sable pour aller puiser dans ces argiles, qui permettent de ne pas souffrir de la sécheresse », explique François Despagne. Propriété de la famille Grégoire depuis 2015-2016, le domaine, d’une superficie légèrement supérieure à 16 hectares, est aujourd’hui dirigé par les deux frères vignerons. Cet assemblage 2019, alliance à 60 % de merlot, 35 % de cabernet franc et 5 % de cabernet sauvignon « aux jolis tanins offre une interprétation plus concentrée et riche du millésime » d’après le grand reporter.

Château Petit Faurie de Soutard 2019

Acquise récemment par la mutuelle santé AG2R, ce domaine est doté d’un vignoble en pied de côte en partie sableux et en partie calcaire. À partir des 5,5 hectares en production (sur les huit que compte le domaine), cet assemblage à 82 % merlot, 13 % cabernet franc et 5 % cabernet sauvignon, « fruit d’une extraction mesurée, est élancé, exprimant toute la délicatesse du terroir, et paré de tanins soyeux le rendant déjà accessible. »

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