[Entretien] Mais qui est Philippe Marques, le nouveau sommelier du Royal Champagne ?

Ouvert en 2018, le Royal Champagne est déjà une adresse plébiscitée par les Champenois, et pour animer sa cave qui ne compte pas moins de 500 références de champagnes, il fallait un sommelier d’élite. Le choix s’est porté sur Philippe Marques qui nous a raconté son étonnant parcours

Comment avez-vous épousé la carrière de sommelier ?

Je suis né à Orléans, la première ville productrice de vinaigre, on ne peut donc me taxer de chauvinisme lorsque je dis que j’aime un vignoble ou un autre. Je suis arrivé à la sommellerie par pur égo. Je sortais de troisième et je faisais un apprentissage dans un Novotel comme serveur. Un jour, un client m’a demandé le cépage d’un Saumur-Champigny. Je lui ai répondu du tac au tac, et j’ai senti son regard changer. J’ai découvert alors que le vin était quelque chose de puissant. Lorsque l’on s’y connaît, on gagne le respect des gens. J’ai commencé à m’y intéresser. Le hasard a voulu que ce soit Paul Brunet qui me fasse passer mon CAP, l’homme qui a inventé la sommellerie moderne en France. J’avais fait l’impasse sur la cuisine. Tous les candidats passés avant moi avaient commencé par la connaissance des plats. Les deux examinateurs au moment où je suis arrivé ont voulu débuter par la partie vin pour varier les plaisirs. J’ai très bien répondu à leurs questions, mais ils m’ont dit « jeune homme, on ne va pas vous mettre vingt comme ça ! », et ils ont continué à jouer avant de s’apercevoir qu’ils n’avaient plus le temps de m’interroger sur la partie cuisine. Paul Brunet est ensuite venu me trouver pour me recommander de rejoindre la mention complémentaire de Strasbourg.

Vous avez collectionné les belles adresses…

J’ai travaillé chez Georges Blanc avant de faire mon service militaire en tant que maître d’hôtel du premier ministre Alain Jupé, très amateur de Lynch-Bages. Ensuite, je suis parti travailler à Bordeaux au Pavillon des Boulevards. J’ai été un peu déçu par l’accueil réservé par certains domaines bordelais aux sommeliers. Le coup de grâce a été lorsque j’ai contacté un grand cru classé qui m’a répondu que les visites étaient réservées aux professionnels, ce qui n’intégrait apparemment pas mon corps de métier !

C’est ce qui m’a poussé à partir en Angleterre où j’ai vécu un bonheur absolu. Outre-Manche, on a affaire à des gens qui s’intéressent au vin et qui savent qu’ils ne savent pas, ce qui fait qu’ils finissent par accumuler beaucoup d’érudition. N’importe quel vin produit dans le monde est disponible. Ainsi, c’est là-bas que j’ai dégusté mon premier riesling mosellan. Comme ils ne sont pas producteurs, ils ne sont pas limités par un quelconque chauvinisme.

Puis, je suis revenu à Paris chez Lucas Carton. Alors que je n’étais qu’un gamin, M. Sendereins m’a fait déguster tous les plats pour me demander mon avis sur les accords. C’était fou de se retrouver face à un tel monstre qui vous faisait confiance et acceptait la remise en question. Chez lui, j’ai rentré quelques champagnes de vignerons dont Françoise Bedel, une illustre inconnue en 2004. À l’époque, tout le monde ne voulait que du Veuve Clicquot ou du Roederer. Pour vendre un champagne de vigneron à un client, il fallait lui tordre le bras ! Lorsque j’ai fait l’ouverture du prince de Galles, je me suis battu pour que l’on maintienne une ligne de libre pour un champagne de vigneron en plus du champagne de maison sous contrat. On était en 2013, et je me suis rendu compte que le monde avait changé, les champagnes de vignerons avaient fait un bond en termes de qualité et de diversité, la réceptivité de la clientèle elle aussi était devenue folle. Ils représentaient 50 % de nos ventes ! Tout le monde était curieux de découvrir chaque mois celui que j’avais choisi.

Au Bistro Volnay, vous vous êtes illustré par vos accords poivres et vins…

J’avais une quarantaine de poivres à disposition qui me servaient de traits d’union avec les plats. Sur un poisson que l’on aurait marié avec un vin blanc, je m’amusais par exemple à proposer un Mercurey. Sans le poivre, les deux s’autodétruisaient, mais avec le poivre on s’apercevait qu’ils se respectaient ! Comme le monde de la gastronomie est essentiellement axé sur les vins blancs, le poivre m’a permis de sauver quelques belles bouteilles…

Qu’est-ce qui vous a amené en Champagne ? Quels sont vos projets au Royal ?

La Champagne n’a de cesse de progresser, il y a beaucoup à découvrir et pour moi, le Royal Champagne qui se trouve au beau milieu des vignes, en est le nombril ! Parmi mes projets, j’ai commencé à rentrer des Bruts sans année pour les faire vieillir. Peu de gens connaissent cette aptitude qu’ils ont et pensent qu’elle est réservée aux millésimés. Ce qui pourrait être intéressant, ce serait par exemple de pouvoir proposer au client la base en cours de commercialisation en même temps qu’une base plus ancienne qui aurait bénéficié des mêmes conditions climatiques.

https://royalchampagne.com/fr/

Salon Fines Bulles, Royal Champagne ©DR

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