[Entretien] Union des Grands Crus : Ronan Laborde, acte 2

Tout juste réélu à la présidence de l’Union des Grands Crus de Bordeaux, Ronan Laborde (propriétaire du château Clinet à Pomerol) dresse le bilan de son premier mandat et se projette sur les priorités des trois années à venir. Entretien.

Vous avez été élu à la présidence de l’Union des Grands Crus de Bordeaux en 2019, succédant à Olivier Bernard. Quel bilan dressez-vous de ce premier mandat de trois ans ?
Le premier bilan que je dois tirer est que nous sommes une association extrêmement unie, qui a su montrer sa force en s’adaptant à des événements tout à fait inattendus, liés à la Covid-19. J’ai dit devant les membres de l’Union il y a quelques jours qu’il s’agissait d’un scénario digne d’une science-fiction et je le maintiens toujours. Je ne sais pas si l’on était préparé à traverser cet épisode de pandémie, ces confinements successifs qui se sont succédé depuis 2020. Malgré les contraintes, pendant ces deux dernières années nous avons su maintenir un lien avec nos prescripteurs comme avec les consommateurs, nous avons su adapter notre communication et nos événements sous de nouveaux formats, poursuivre les dégustations même à distance… C’est donc un constat positif que d’avoir su surmonter ces obstacles et continuer à être visibles.

De façon plus détaillée, quels ont été les principaux « piliers » des trois années écoulées ?
Il y a d’abord la partie événementielle, qui est la partie historique de l’Union des Grands Crus. On a su maintenir les dégustations même en « distanciel », adapter nos masterclasses en les digitalisant, on a accru nos conférences de presse, avec le souci de toujours mieux communiquer, expliquer, ce qui fait la singularité de notre association et des grands crus de Bordeaux. En matière de communication numérique, nous avons fortement accéléré en créant un média dédié, « Vintage by UGCB », qui publie une quarantaine d’articles par an, des vidéos de présentation des appellations et châteaux, on a mieux animé les réseaux sociaux… Enfin, on a développé le volet formation, via les masterclasses, mais aussi les rencontres avec les futurs sommeliers via une tournée faite par plusieurs de nos membres dans différents lycées hôteliers avec mention sommellerie en France, en Belgique, en Suisse ou au Royaume-Uni – ce qui nous permet d’échanger avec ce public de futurs professionnels dans un cadre « sur mesure » réunissant 6 à 14 personnes. Nous avons eu d’excellents retours sur ces initiatives.

Accessoirement, nous avons réussi à maintenir les Primeurs à Bordeaux, ce qui n’était pas une mince affaire en période de pandémie. On a réussi à organiser des présentations du millésime 2019 dans un contexte sanitaire très tendu, afin de permettre à la campagne de se dérouler. Cela nous a ensuite incité à revoir un peu le calendrier et à positionner la Semaine des Primeurs un peu plus tard, ce qui a permis de réduire l’écart entre le temps de la dégustation et celui de la commercialisation. En confortant le côté immuable des Primeurs à un moment où certains pouvaient avoir des doutes, on a pu sortir de beaux millésimes consécutifs, l’Union a joué son rôle.

Quels sont les axes prioritaires de votre second mandat, entamé le 10 février ?
Repartir au contact, tout d’abord. Avec une perspective de sortie de la pandémie, on a hâte de revenir à la rencontre de nos clients. L’Union fait entre 60 et 80 événements chaque année, cela nous donne l’occasion de repenser leur organisation, leur scénographie, la configuration des échanges et ce, tout au long de l’année, afin de personnaliser encore plus les relations. Dans la même optique, nous allons continuer à affiner encore nos fichiers de professionnels, afin de toujours mieux connaître nos interlocuteurs. La pandémie a fait de sérieux dégâts et entraîné des mutations au sein du secteur de la restauration, dans le monde entier, et il faut repartir à la rencontre de ces acteurs. On voit aussi l’émergence de nouveaux talents, de gens qui ont changé de vie pour se reconvertir dans le vin ou la restauration, il faut que l’on aille à leur rencontre. On va continuer à poursuivre le chantier sur la communication digitale, mais aussi développer des formats plus intimistes, « en immersion », sous la forme de petits séminaires pour des professionnels qui soit ne peuvent pas venir à Bordeaux pour les Primeurs, soit ne sont pas en mesure d’accueillir nos déplacements.

Parmi les prochaines grandes échéances de l’Union, il y a dans deux mois, la présentation du 2021 en Primeurs… Comment s’annonce le lancement de ce millésime chahuté ?
Je le vois avec beaucoup d’enthousiasme. On va pouvoir de nouveau accueillir les professionnels du monde entier à Bordeaux. On concocte un programme très séduisant, avec un peu moins de points de dégustation pour alléger les « sauts de puce » dans le vignoble et permettre aux dégustateurs de passer plus de temps sur les sites, dans de bonnes conditions. Nous préparons un grand dîner d’accueil en ouverture de la Semaine des Primeurs, dans le cadre prestigieux du château d’Yquem, mais dans une ambiance décontractée pour que chacun passe un bon moment. Concernant le millésime 2021, si l’on veut bien le comprendre il faut venir le déguster à Bordeaux, en tout cas pour ce qui relève des professionnels européens ou américains. En Asie la situation sanitaire risque d’être encore contraignante, donc nous établirons une session à Hong Kong pour permettre aux professionnels asiatiques de déguster le millésime.

Enfin, en tant que président de l’Union, quel diagnostic portez-vous sur l’image et les atouts de Bordeaux dans le paysage mondial du vin ?
Bordeaux est de nouveau sur une bonne dynamique. Les chiffres en attestent : record d’exportation en 2021, reconquête de parts de marché… Certes, le contexte a changé, la concurrence est de plus en plus accrue et Bordeaux ne retrouvera plus ses parts de marché d’il y a dix ou vingt ans, mais on a face à nous des clients enthousiastes et constants, qui ont compris que Bordeaux n’est pas une région stéréotypée mais riche de nuances, où ils peuvent trouver une large variété de vins. Il y a plusieurs bordeaux, et on s’attache à communiquer sur la singularité de nos appellations, de nos châteaux… Dans une dégustation de l’Union, il y a plein de styles à apprécier, et c’est ainsi que l’on continue de convaincre : les professionnels comme les amateurs voient le savoir-faire, le côté de plus en plus vertueux de nos pratiques, et cela contribue à redorer l’image de Bordeaux. J’ajouterai que notre système commercial, notre « Place de Bordeaux », a su montrer son efficacité et continuer à renforcer le lien avec la clientèle internationale.

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