Le soufre (ou les sulfites) dans le vin, ça sert à quoi ?

C’est un débat qui n’existait quasiment pas il y a une vingtaine d’années. Mais aujourd’hui, c’est devenu une ligne de fracture entre amateurs et surtout critiques du vin. Le soufre (ou les sulfites), conservateur classique du vin, est attaqué par les uns et défendu par les autres. Que faut-il en penser ?

Vous n’avez pas pu passer à côté du fameux « contains sulfites », présent sur la plupart des bouteilles de vins, mention obligatoire à partir de 10 mg/l (SO2 Total). Soufre, SO2, dioxyde de soufre ou sulfites : on parle bien de la même chose. Les teneurs en dioxyde de soufre totales ne peuvent dépasser certaines limites en Europe*.

Pour l’agriculture conventionnelle :

  • Vins tranquilles secs (sucre <5g/L) : 150 mg/L pour les rouges et 200 mg/L pour les blancs et rosés
  • Vins effervescents : 235 mg/L (185mg/L pour les crémants et champagnes)
  • Vins moelleux et liquoreux : 300 mg/L et 400 mg/L
  • Vins de liqueur et vins doux naturels : 200 mg/L

Pour l’agriculture biologique :

  • Vins tranquilles secs (sucre <5g/L) : 100 mg/L pour les rouges et 150 mg/L pour les blancs et rosés
  • Vins effervescents : 205 mg/L (155mg/L pour les crémants et champagnes)
  • Vins moelleux et liquoreux : 270 mg/L et 370 mg/L
  • Vins de liqueur et vins doux naturels : 170 mg/L

Pour l’agriculture biodynamique (demeter) :

  • Vins tranquilles secs (sucre <5g/L) : 70 mg/L pour les rouges et 90 mg/L pour les blancs et rosés
  • Vins effervescents : 60 mg/L
  • Vins moelleux et liquoreux : 130 mg/L et 200 mg/L
  • Vins de liqueur et vins doux naturels : 80 mg/L

Notons que tous les vins peuvent contenir naturellement des sulfites, y compris ceux auxquels aucun sulfite n’a été ajouté : au cours de vinification, les levures produisent du soufre. C’est pourquoi il faut utiliser “sans sulfites ajoutés” pour parler des vins natures.

Pour les vins naturels (chartre de l’AVN) :

  • Vins tranquilles secs (sucre <5g/L) : 30 mg/L pour les rouges et 40 mg/L pour les blancs et rosés
  • Vins effervescents : 40 mg/L
  • Vins moelleux et liquoreux : 40 mg/L
  • Vins de liqueur et vins doux naturels : 40 mg/L

A noter que la majorité des vins nature ne sont pas forcément certifiés AVN. 

A quoi sert le soufre dans le vin ? Comment l’utilise-t-on ?

Le dioxyde de soufre (SO2) est l’additif chimique le plus utilisé dans l’élaboration du vin et aussi le plus controversé pour des raisons gustatives, mais aussi de santé. C’est un antioxydant qui ralentit la vitesse des réactions d’oxydation et c’est aussi un antimicrobien. Son utilisation en vinification a pour but d’inhiber ou de tuer certaines levures et bactéries jugées indésirables et de protéger le vin de l’oxydation. Il est utilisé à différentes étapes de la vinification et le vin fini en contient sous la forme de sulfites. Il faut savoir aussi que la fermentation de raisins produit parfois “naturellement” du soufre, même dans les vins… non soufrés. Notons aussi que le dioxyde de soufre (SO2) n’a rien à voir avec la poudre de soufre jaune que l’on pulvérise sur les vignes pour les protéger de l’oïdium (qui peut d’ailleurs être utilisé dans un mode de culture bio).

Il y a très longtemps que le soufre est utilisé en vinification. La première mention explicite de son usage remonte à un décret allemand de 1487 qui autorisait les vignerons à brûler des copeaux de bois soufrés dans les tonneaux utilisés pour conserver le vin. C’est une méthode de désinfection efficace qui est toujours en pratique aujourd’hui et que l’on nomme le “méchage” (on utilise plutôt de la poudre de soufre pure que des copeaux de bois) même si le nettoyage à la vapeur est une bonne alternative.

Mais on utilise le SO2 surtout pour contrôler la fermentation et stabiliser le vin au moment de la mise en bouteille. Il y a principalement quatre moments dans la vie du vin ou le dioxyde de soufre est couramment utilisé dans l’élaboration du vin.
* A la vendange, il peut être mis sous la forme de metabisulfite afin de limiter l’action des levures sauvages et prévenir l’oxydation ainsi qu’un début de fermentation non contrôlé. Ici le soufre joue le rôle d’un désinfectant préventif pour éviter que les “plaies” (raisins éclatés par exemple) tournent mal (un sulfitage totalement inutile quand la vendange est parfaitement saine, sans grains éclatés et qu’elle est maniée avec précaution, en petite cagette, sans écraser les raisins sous leur propre poids).
* Pendant le foulage le soufre peut être ajouté pour éviter un début de fermentation avec les levures indigènes
* Lors de la fermentation le soufre peut être ajouté à n’importe quel moment mais le plus souvent à la fin de la fermentation pour stopper ou empêcher une fermentation malolactique (transformation de l’acide malique en acide lactique, nettement moins agressif) plus souvent recherchée sur les rouges que les blancs.
* Enfin on peut en ajouter au moment de la mise en bouteille afin de prévenir l’oxydation (ou toute autre action microbienne) dans la bouteille de vin lors de sa conservation.

Cette façon de faire est la version “classique” de la vinification, celle qu’on apprend généralement dans les formations œnologiques où l’esprit est de surtout ne pas prendre de risque.

Pourquoi critique-t-on l’utilisation du soufre dans le vin ?

Tout vigneron un peu sérieux et désireux que ses vins traduisent le plus fidèlement possible l’expression de ses terroirs se doit en effet de limiter autant que possible l’ajout de soufre. Pourquoi ? Pour deux raisons essentielles. L’une qui n’a rien à voir avec les questions de terroir est tout simplement un problème de santé : certaines personnes sont allergiques ou tolèrent mal le soufre, ce qui se traduit généralement par un mal de tête parfois violent et des réactions cutanées (rougeurs). La seconde raison est d’ordre gustative : le soufre “bloque” l’expression aromatique du vin, l’enferme dans une sorte de carcan qui le verrouille, sans parler des notes de grillé et d’allumette qui trahissent sa présence excessive.

Peut-on se passer ou au moins nettement diminuer l’ajout de soufre dans le vin ?

Nous avons exposé la méthode classique d’utilisation du soufre dans le vin, mais la réalité sur le terrain est très différente. Lorsqu’on conduit bien sa vigne sans produits chimiques, lui “apprenant” ainsi à se défendre naturellement, on obtient généralement des raisins sains qui n’ont pas besoin d’être sulfités à la vendange.

Ensuite, dans un chai parfaitement tenu, la “désinfection” par le soufre est également inutile, ou alors à des doses homéopathiques lors des soutirages (passage d’un contenant dans un autre) au cours desquels on peut prendre la précaution d’un léger sulfitage pour éviter tout risque d’oxydation.
Enfin, pour éviter tout éventuel problème de conservation en bouteille, on peut effectivement légèrement sulfiter le vin lors de la mis en bouteille.

On peut noter aussi que les vins rouges ont moins “besoin” de soufre que les vins blancs car ils possèdent des antioxydants naturels provenant des peaux de raisins et des tannins, alors que les blancs (qui fermentent sans les peaux) en sont dépourvus. Un léger gaz carbonique naturel protège également efficacement le vin de toute oxydation. A l’inverse, les vins blancs liquoreux, qui contiennent par définition une forte de dose de sucres (qui ne demandent qu’à continuer à fermenter) doivent être “bloqués” par une forte dose de soufre.

Conclusion : le soufre, oui, mais à plus petites doses

Le soufre, à des doses faibles peut donc être un ami du vin, pour l’empêcher de s’oxyder ou de se transformer en vinaigre (ce qui arrive parfois chez des vignerons jusqu’au boutistes adeptes du sans soufre absolu) ; il est donc rassurant, particulièrement pour des vins destinés à de longues gardes ou à voyager. Mais son usage excessif  nuit nettement à l’expression de ses qualités gustatives et peut gêner les personnes tolérant mal les sulfites.

Malheureusement, formatés par une œnologie très technicienne, de nombreux vignerons jouent encore un peu trop avec des doses de soufre inutilement élevées, même si la tendance moyenne est heureusement à une baisse sensible des doses de SO2 dans le vin.

*Sources : Institut Français de la vigne et du vin (IFV) – Grille d’évaluation des pratiques œnologiques, Note précisant les teneurs maximales en anhydride sulfureux (en mg/l) autorisées en agriculture biologique par couleur et en fonction de la teneur en sucres fermentescibles (G+F (en g/l))

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