Le vin a-t-il sa place dans l’univers des NFT ?

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Chaque mois, Angélique de Lencquesaing participe sur BFM Patrimoine à l’émission matinale consacrée aux placements. Elle y évoque le marché du vin, sous l’angle de l’investissement. Dans son intervention du 2 juin dernier, elle évoque les premières expériences NFT dans le domaine du vin. Décryptage d’un univers en profonde mutation.

Vincent Touraine : Angélique de Lencquesaing, vous intervenez régulièrement sur le plateau de BFM Patrimoine pour évoquer les ventes aux enchères de vin, un marché qui existe depuis plusieurs siècles. Aujourd’hui, vous nous emmenez dans un univers nouveau, celui des NFT. Nous allons voir ensemble comment le vin peut s’insérer dans ce nouvel univers 3.0.

A de L. Oui, effectivement, après le web 1.0, celui de l’information (Google, Yahoo…) est venu le web 2.0, celui de l’échange et de l’interactivité, avec l’apparition des réseaux sociaux. Et désormais nous abordons l’univers 3.0, celui de la décentralisation, celui de la blockchain, des NFT, des crypto-monnaies et du metavers.

V. T. On en parle de plus en plus mais cet univers-là n’est pas si récent…

A de L. Effectivement, la block chain (registre public, anonyme et infalsifiable) remonte à 1995. Chaque information (une transaction, par exemple), est historisée dans un bloc, les différentes informations sont liées entre elles (la chaine), le tout est stocké sur un réseau d’ordinateurs de par le monde.

A de L. Les premières crypto-monnaies comme le bitcoin ont déjà plus de 10 ans, quant aux NFT – procédé consistant à associer à un titre de propriété une image unique, un objet unique, une vidéo unique et de l’intégrer à la Blockchain – les NFT sont apparus en 2015. L’année suivante était créé le portefeuille virtuel, ainsi que le metavers, cet univers virtuel issu du monde du jeu vidéo.

V. T. Et maintenant, l’univers du vin s’empare du sujet…

A de L. C’est tout un éco-système qui s’est progressivement mis en place. Posséder un NFT c’est entrer dans un club restreint de collectionneurs. Cet univers des collections limitées est aujourd’hui celui qui offre le plus de potentiel. Les grandes marques, et les marques de luxe tout particulièrement ne s’y sont pas trompées, pour nouer des relations particulières avec leur communauté d’afficionados. Le vin, naturellement, appartient pour partie à cet univers du luxe, de la rareté, de la collection. Il a toute sa place dans cet univers.

V. T. Plusieurs initiatives (Dom Pérignon, Angélus) ont vu le jour sans rencontrer pour l’instant un vif succès, pourtant ?

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A de L. Elles ont eu le mérite d’ouvrir la voie d’une expérience associant le monde bien réel du vin et l’univers 3.0, qu’il s’agisse de cette barrique d’Angélus associée à un NFT comportant une vidéo de la cloche emblèmatique de la propriété, ou la collaboration entre Lady Gaga et Dom Pérignon qui a donné lieu à la production d’une œuvre exclusive imaginée par la chanteuse, habillant un jéroboam de Dom Pérignon Rosé Vintage 2005. Tout un espace virtuel, un pop-up store virtuel a été créé à cet occasion, permettant aux amateurs d’acquérir des NFT comportant des visuels de l’œuvre… et de recevoir le flacon de champagne rosé chez eux.

Nous sommes encore dans un monde pionnier, qui séduit un public jeune et connecté.  Pour autant, ces opérations nécessitent d’être pleinement intégrées dans l’éco-système 3.0 pour rencontrer le succès espéré. Au-delà de l’opération marketing innovante, elles doivent toucher un public spécifique, une communauté pré-existant à l’opération elle-même, bien identifiée, qui interagit sur des réseaux sociaux spécifiques (Discord).

V. T. Vous-mêmes chez iDealwine, faites partie des pionniers dans le domaine du NFT, avec la mise en place de vos puces WineDex ?

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A de L. Nous n’avons effectivement pas démarré dans le domaine du NFT à proprement parler, par un concept d’image, ni d’expérience particulière, mais plutôt dans un souci de renforcer les éléments d’expertise et d’authentification des bouteilles de vin qui nous sont confiées dans le cadre des ventes aux enchères. Des faux circulent, de plus en plus nombreux, notamment sur certains marchés, et nos clients asiatiques nous demandaient des informations, des photos de plus en plus précises sur les flacons qu’ils s’apprêtaient à acheter.

C’est ainsi que nous avons commencé à apposer fin 2019 notre première pastille baptisée WineDex, développée avec la société Synvance. Les bouteilles les plus chères – à l’origine, celles estimées à plus de 1000€, le seuil étant passé à 500€ aujourd’hui – sont équipé d’un tag inviolable qui garantit de manière permanente le lien entre la bouteille et les informations d’expertises contenues dans la blockchain.

V. T. On est effectivement loin de l’opération d’image…

A de L. Oui, ça n’était pas très glamour à l’origine, puisqu’il s’agissait pour nous de stocker plus de 50 points d’expertise propres à la bouteille. Ce qui donne lieu à l’émission d’un certificat d’authenticité, reposant sur des smart contracts. Il suffit ensuite au propriétaire de la bouteille de scanner la pastille au travers de l’application WineDex pour accéder au certificat et aux informations d’expertise. Mais attention, si la pastille WineDex est retirée, et apposée sur une autre bouteille, elle se détruit.  Le lien entre la bouteille et ce certificat est unique, et parfaitement sécurisé. Les informations sont stockées sur la Blockchain d’iDealwine, une blockchain privée, pour l’instant… mais nous ne comptons pas nous arrêter là.

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Combien de flacons sont aujourd’hui équipés de cette pastille WineDex ?

A de L. Nous allons bientôt franchir le seuil des 10 000€ bouteilles équipées.  7500 ont déjà été vendues, pour un montant total de 11.2M€. Plus de 1 100 acheteurs possèdent des bouteilles équipées de la pastille WineDex. Une communauté de grands collectionneurs qui s’élargit progressivement.

V. T. Vous évoquiez le domaine de la collection et des éditions limitées, vous avez récemment franchi une nouvelle étape dans ce domaine ?

A de L. Oui, en établissant un pont entre le vin, l’art et les enchères. Vous savez que le marché de l’art est actuellement boosté par les NFT, les ventes d’œuvres numériques. Des initiatives passionnantes se font jour dans les musées qui proposent, à l’instar du British Museum la vente d’œuvres numériques pour financer leurs acquisitions.

Aux enchères aussi, les initiatives se multiplient dans le domaine de l’art. Mais pour le vin, aux enchères, nous avons effectivement adjugé pour la première fois des flacons équipés directement d’un NFT comportant une oeuvre. D’autres opérations associant un vin à une œuvre unique ont déjà eu lieu, mais les deux éléments étaient dissociés.

Là, il s’agissait de magnums d’un cru de Saint-Emilion, le Château Edmus, qui a réalisé une cuvée spéciale baptisée Phi, un pur cabernet franc élevé en œuf béton, et vinifié sans soufre.

Les magnums sont habillées d’étiquettes qui sont des œuvres uniques réalisées par l’artiste tatoueur Dimitri HK. 10 magnums, sur la série de 20 produits, ont été proposés aux enchères.

L’un d’entre eux, équipé de l’étiquette n°1, a été adjugé 5 216€.

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V. T. Pour un prix d’estimation de…

A de L. Il était difficile à déterminer ! Les enchères sur chaque magnum démarraient à 1€, et l’estimation de chaque flacon avait été fixée à 250€. Autant dire que le montant a été largement dépassé puisque les 10 magnums ont atteint 22 413€, soit plus de 7 fois leur estimation. 

V. T. Que comporte le NFT associé à la bouteille dans ce cas précis ?

A de L. Parmi les informations numériques, on trouve l’œuvre unique de l’artiste. Même si dans le monde réel, chaque acquéreur va recevoir l’œuvre originale sur papier réalisée par l’artiste. Par ailleurs, l’acheteur bénéficie d’un contrat de conservation de 5 ans chez iDealwine.

V. T.  L’acquéreur ne reçoit pas la bouteille ? Il ne pourra pas boire le vin ?

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A de L. C’est tout le sujet du NFT. Si la bouteille est ouverte et bue, le NFT n’aura plus de valeur marchande en dehors de l’œuvre d’art associée au vin. Le vin ne bouge pas, c’est ce qui offrira à terme la possibilité à son propriétaire de revendre son NFT, sans que la bouteille ne bouge.

V. T. Le potentiel de ce marché est-il important ?

A de L. Le marché des NFT est estimé à 41Mds USD aujourd’hui, les perspectives de J.P. Morgan annoncent 80 Mds USD à horizon 2025. Dans le monde, 400 000 personnes achètent des NFT de manière active. Ce système se prête particulièrement bien au marché du vin, et particulièrement aux vins destinés à vieillir plusieurs années avant d’être consommés. Un vin pourra en effet changer de mains plusieurs fois sans que la bouteille ne bouge physiquement. C’est bon pour le vin, c’est bon pour la planète aussi.

V. T. Plusieurs initiatives voient le jour dans ce domaine actuellement, la course de vitesse est donc lancée, vous vous situez comment dans cette course ?

A de L. Oui, effectivement, on entend parler de différents concepts appliqués au vin. Beaucoup sont encore à l’état de projet. Nous avons déjà réussi le lancement du premier étage de la fusée. Le développement des smartcontracts associés aux pastilles WineDex. L’adjudication des premiers NFT liés à une bouteille de vin. Notre communauté mondiale qui compte plusieurs centaines de milliers d’amateurs est informée et connectée. D’autres étapes sont à venir. Les perspectives de développement sont exponentielles, je vous le confirme !

Consultez les ventes de vin sur iDealwine

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