Le clairet, à mi-chemin entre un rosé et un vin rouge léger est une spécialité, peu connue, de l’appellation Bordeaux. Au moment où les rosés pâles ont le vent en poupe, c’est le moment de parler de ce vin particulier, un peu confidentiel et à contre-pied de la tendance actuelle, mais digne d’intérêt.
Son origine remonte à l’époque où, pendant trois siècles et jusqu’à la bataille de Castillon en 1453, Bordeaux expédiait vers l’Angleterre son French Claret : un vin rouge très prisé à la robe claire. Une fois l’Aquitaine reconquise par les rois de France, la tradition de produire ce vin clair a perduré, à la marge de la production traditionnelle des vins rouge et blanc. C’est en 1950 que, avant de devenir un professeur éminent à la faculté d’œnologie de Bordeaux, l’œnologue Emile Peynaud élabore avec le président de la coopérative de Quinsac, Roger Amiel, le processus de production du Clairet. Mais comment produit-on ce rosé coloré ?
« Il y a autant de technicité que pour un rosé ou un blanc » nous dit Sylvie Courselle du château Thieuley à la Sauve Majeure, dans l’Entre deux Mers. François Castaigna, de la cave de Quinsac décrit « la vendange est éraflée et mise en cuve. Les baies font une macération à froid pendant 48 h ». Un temps où le départ en fermentation est bloqué, mais qui permet à la couleur, aux tanins et aux anthocyanes contenus dans la peau de se diffuser dans le jus clair. « Puis on fait un écoulage pour récupérer ce jus coloré : la fermentation peut alors commencer ». Le cépage majoritaire est le merlot « entre 65 et 80 % à Thieuley », complété le plus souvent par du cabernet sauvignon et du cabernet franc. Cette macération demande de la technicité et des équipements, car il faut thermoréguler les cuves, à des températures différentes selon le cépage. De manière générale, la diffusion de la couleur initialement contenue dans la pellicule se fait d’autant plus rapidement que la température de macération est élevée, mais plus la température est haute moins on a de fraîcheur. Un équilibre couleur/fraîcheur qui demande donc du doigté pour l’obtenir.
qui conseillent beaucoup de châteaux à Bordeaux voient « les ventes de ce produit qui décollent et des stocks dans les châteaux qui sont bas ». Il est vrai que la surface consacrée au clairet est faible : 925 ha sur la Gironde. Mais il est facile d’utiliser une vendange initialement destinée au vin rouge pour faire du Clairet. « C’est un produit peu connu, mais quand on le fait goûter, ça ouvre des portes » avoue François Castaigna. Il est vrai que les arômes de fruits rouges séduisent. Le vin intrigue par sa couleur intense, mais se montre léger, friand et fruité, souple et doté d’un certain corps tout en offrant des tannins doux et une réelle plénitude aromatique. La bouche est un peu plus vineuse qu’un rosé avec une finale plus longue.
Bien que les volumes de production restent modestes, le Bordeaux Clairet connaît un regain d’intérêt mérité qui pourrait se traduire par une augmentation progressive de ses ventes à mesure que les consommateurs découvrent ou redécouvrent ce vin traditionnel de Bordeaux qui a gagné en qualité depuis quelques années.
Le magazine Terre de vins dédié aux vins rosés est en kiosque depuis le 10 juillet.
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