À Sancerre et dans toutes les appellations du Centre-Loire, les vendanges sont terminées et les vignerons peuvent souffler. La fin d’une année climatique sans précédent, dominée par la pluie et les maladies, qui se dénoue mieux que prévu. On attend une récolte réduite en volume, en particulier pour les rouges, mais dont le style, plus léger que ces dernières années, saura plaire à bien des amateurs.
Le millésime 2024 restera gravé dans les mémoires comme l’un des plus défiants de ces dernières décennies. Dès le printemps, les vignerons ont dû faire face à un climat capricieux, avec des épisodes de gel tardif puis de grêle qui ont sévi sur certains secteurs du vignoble. À cela s’est ajoutée une pluviométrie record, tant en termes de quantité d’eau que de fréquence, qui a notamment entraîné une pression du mildiou constante. Avec des pluies abondantes et un ensoleillement limité, 2024 s’inscrit comme un millésime tardif, où la maturation des raisins a été lente, aboutissant à des vendanges qui n’ont pris leur rythme qu’à la fin du mois de septembre, voire au début du mois d’octobre.
À l’heure où les vinifications avancent dans les caves du Centre-Loire, les retours sur la dégustation des fermentations en cours offrent d’agréables surprises. Le potentiel qualitatif est bien présent, avec des jus marqués par une belle acidité. Bien travaillés avec un élevage approprié et une mise en bouteille au bon moment, ils pourront donner des vins équilibrés, élégants et frais, porteurs de l’ADN des vins de Loire sur ce type de millésime « de vigneron ».
Il n’y a pas que Sancerre et Pouilly-Fumé. Les vignobles du Centre-Loire regroupent dix appellations, certaines établies de longue date comme Quincy, la première AOC reconnue depuis 1936, d’autres plus récentes ou confidentielles comme Châteaumeillant ou les Coteaux-de-Tannay. Le vignoble est réparti sur 5 900 hectares sur les coteaux surplombant la Loire et dans la vallée du Cher, en plein cœur de la France. Les différences sont nombreuses, mais cette année, les conditions climatiques ont été partout impitoyables.
Olivier Luneau, vigneron avec sa compagne Patricia à Menetou-Salon au domaine Jean Teiller, résume ces conditions climatiques inédites. Il est tombé 1 400 mm d’eau sur 12 mois, tout simplement le double d’une année habituelle ! Mais il voit aussi le bon côté : « La pluie est souvent tombée la nuit, et comme on vendange à la main, on ne s’est arrêté que deux jours depuis le 23 septembre. » Pour les vins blancs, majoritaires dans son appellation comme partout en Centre-Loire, le mildiou, même s’il a vite attaqué les grappes après avoir touché les feuilles, n’est dramatique que pour les volumes qu’il réduit. Il ne donne pas de faux goûts comme peut le faire l’oïdium.
« On a perdu du volume à chaque étape » explique Loïc Cailbourdin, « le gel, la pluie et la floraison. Une perte jusqu’à 75?%. Il est tombé 120 mm sur la fleur. Puis le mildiou. » Le vigneron de Pouilly-Fumé prévoit des rendements très hétérogènes, 20, 30, 40 hl/ha selon les zones, mais parfois seulement 10 hl. Il n’est pas inquiet car il n’y a pas d’impact sur la qualité, et il a l’habitude de garder un peu de stock. Il vend actuellement les 2022. « C’est notre meilleure assurance, mais il faut une récolte normale l’année prochaine » conclut-il.
À Bué, dans le Cher, Fabien Cirotte se réjouit d’avoir attendu pour vendanger : « J’ai pris le risque que ça s’abime, mais je ne voulais surtout pas avoir un côté végétal. » En Sancerre blanc, il obtient finalement un volume correct et un degré qui lui plait, autour 12,5°, loin des 14° du 2020. Ce n’est pas le cas pour le Sancerre rouge. Il a été grêlé à 40?% et les grains ont eu du mal à mûrir. Il a ensuite fallu beaucoup d’yeux et de mains sur la table de tri.
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