À Cabrerolles, à cheval entre les appellations Faugères et Saint-Chinian, le domaine du Météore jouit d’une spécificité quasiment unique en Europe : une de ses parcelles se trouve dans un cratère météoritique.
À plus de 300 mètres d’altitude, dans les contreforts des monts du Haut-Languedoc, le domaine du Météore n’est pas à première vue un ovni (objet viticole non identifié !). Pourtant, quand on pousse les portes de l’exploitation de 30 hectares, un panneau « cratère » vient rappeler la singularité du site : une vigne de 60 ares de syrah est plantée dans un cratère de météorite de 220 mètres de diamètre et de 80 mètres de profondeur. « Depuis les années 50, plusieurs chercheurs du monde entier avaient transmis tour à tour leurs points de vue, mais aucun n’avait vraiment réalisé de cartographie géophysique détaillée du lieu pour valider ou invalider un impact de météorite », explique Simon Frech, le directeur. Puis tout s’accélère soudainement au détour d’un coup du destin. « Tout est parti d’une coïncidence, poursuit ce Bordelais qui a œuvré dans des domaines prestigieux en Argentine et en Nouvelle-Zélande. En pleine période Covid, Frank Brenker, chercheur au département de nano-géoscience et de cosmochimie de l’université Goethe de Francfort, décide de passer ses vacances en France et plus précisément en Languedoc. Au cours d’un achat chez un caviste, il choisit une de nos cuvées un peu par hasard et est intrigué par l’étiquette qui mentionne un cratère. » Le scientifique prend alors contact pour en savoir plus et décide d’investiguer pour déterminer l’origine de ce cratère. Avec son équipe, il se déplace plusieurs fois pour des études de terrain et des prélèvements. C’est dans son laboratoire, régulièrement utilisé pour analyser des échantillons provenant de voyages internationaux d’exploration spatiale, qu’il réussit enfin à percer le mystère.
« On a mesuré un champ magnétique négatif à l’intérieur et autour du site dû à la force de l’impact qui a détruit les structures cristallines de son contenu en fer, éliminant ainsi une partie du champ magnétique. Ce phénomène se retrouve dans 90 % de tous les cratères d’impact dans le monde », explique le géophysicien qui a également utilisé un puissant aimant pour extraire des sphérules d’oxyde de fer, autre preuve géologique de la présence d’une roche spatiale. Selon ses conclusions, la météorite mesurait probablement de 2 à 3 mètres de diamètre et sa vitesse était de l’ordre de 30 000 km/h. « Elle a frappé la terre avec une force de 20-30 giga Pascals (GPa), équivalente à la bombe atomique d’Hiroshima. Les échantillons de nano-diamants retrouvés dans les prélèvements du cratère prouvent l’énorme pression au moment de l’impact », ajoute-t-il. Le coup de projecteur est forcément une aubaine pour les propriétaires Andrew et Vinkey Allen, Paul Jerman et Paul Jenkins. « Il est fascinant de découvrir que les parcelles de vignes environnantes sont couvertes de minuscules sphérules du matériau météoritique, se réjouit ce dernier. Nous pensons que, combinés à notre merveilleux terroir de schistes, ces éléments renforcent les arômes de nos vins et donnent du crédit à l’idée qu’ils « viennent d’une autre dimension » » Dans les faits, rien ne permet pourtant de prouver que ce terroir météoritique influe sur le profil des vins, même si quelques éléments peuvent le faire penser. « Nous avons fait des analyses sur les vins provenant des parcelles autour, et de la parcelle dans le cratère, et nous avons observé des concentrations en nickel et cobalt plus importantes que la normale, ajoute Simon Frech. Même si cela influe probablement sur le profil aromatique, difficile de tirer des conclusions. Cependant, nous avons dans ces vins une grande fraîcheur, des arômes de cardamome, de menthe, de laurier, de camphre et des finales très salines. » Autre point à relever, l’emplacement si particulier de cette vigne. « La particularité du trou du météore, c’est qu’il s’agit d’un point bas, d’une zone d’accumulation de particules fines, confie Chantal Laurens, ingénieur agro et œnologue au laboratoire Natoli qui suit le domaine depuis très longtemps. Le relief crée une vraie différence, il y a un vrai microclimat où la zone est très fraîche, il y a donc plus d’acidité et moins d’alcool dans les vins. » Le terroir idéal pour lancer une cuvée parcellaire pour faire voyager les papilles en méthode traditionnelle !
Rosé (100 % syrah) – Vin de France, AB (25 €)
Nez très délicat sur les agrumes et une pointe de poivre blanc, la bouche délivre une belle tension et une minéralité surprenante, enlacée par une bulle fine et dotée d’une infinie salinité. Et si les minéraux venus de l’espace étaient en cause ? Le domaine prévoit de pousser encore les analyses…
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